Vers un modèle unifié de la navigation bio-inspirée à l’intérieur et à l’extérieur pour l’assistance de déplacements de déficients visuels.
LIEU : LITIS, STI (groupe Perception & Interaction), Université de Rouen, Site Madrillet
Directeur de Thèse : Prof. Edwige Pissaloux
Contact : Edwige.Pissaloux@univ-rouen.fr
Début de thèse : Année académique 2020/2021
Support financier : Bourse ministerielle
Le but de thèse est de proposer un modèle de localisation et de navigation de type odométrie visuelle et inertielle (VIO, [Fus 18, Mil 12]), mais en utilisant des connaissances actuelles sur la navigation des mammifères et utiles à l’intérieur et à l’extérieur, et des cartes géographiques (des plans architecturaux).
Si les déplacements en extérieur peuvent se fonder sur des systèmes de géolocalisation (e.g. GPS), ceux-ci ne sont pas utilisables en intérieur à cause de leur imprécision et d’éventuelles interférences liées aux structures métalliques. La contribution originale de cette recherche sur ce point précis sera l’utilisation du système Européen Galileo (si possible) (avec l’utilisation d’une carte, cf. infra).
Quant à la navigation à l’intérieur des méthodes VIO bio-inspirées sont en émergence et les approches originales sont à rechercher.
Cette thèse vise la navigation dite naturelle, inspirée par la mobilité des mammifères. Ces derniers disposent de neurones spécifiques dédiés à la navigation (cellules de lieu, de grille [Gau 19, Mil 16, Haf 05, O’K 78]) leur permettant de se diriger dans leur environnement avec une grande fiabilité. Les cellules de lieu permettent d’enregistrer et reconnaître les lieux visités, et les séquences de cellules de lieux permettant de rejoindre un point de l’environnement. Ces cellules permettent ainsi d’établir des cartes décentralisées de l’environnement, plus tolérantes aux dérives et autres erreurs de déplacement. Les cellules de grille, quant à elles, permettent une mesure des déplacement et l’intégration du chemin, stratégie de navigation de base permettant d’estimer les déplacements sur de longues distances.
Les modèles artificiels de mobilité fondés sur la fusion des informations acquises à l’aide de différents capteurs artificiels (vision, centrale inertielle, sons, laser, lidar, etc.) permettent une navigation sur de très grandes distances mais leur fiabilité face aux obstacles dynamiques est faible.
Ces modèles ne sont donc pas adaptés au suivi d’une personne, surtout d’une PPIV (personne présentant une incapacité visuelle), et entraînent des écarts (dérives) entre le trajet visé et le trajet effectivement mis en œuvre [Ahe 16]. Aussi, un nouveau modèle de déplacement bio-inspiré, plus adapté aux spécificités d’une PPIV (pouvant accepter et corriger les écarts de trajets, liés notamment à l’évitement d’obstacles) doit être proposé. Par ailleurs, les points d’intérêt de mobilité (PIM), importants et spécifiques aux PPIV, doivent être inclus.
Aussi, afin d’assurer l’efficacité de ce modèle, il devrait s’appuyer aussi sur une carte (mentale ou physique) de l’espace où l’on se déplace [O’R 01]. Un algorithme de mise en correspondance de cartes/plans (augmenté(e) de PIM) avec le modèle de déplacement bio-inspiré proposé doit permettre une localisation rapide du piéton déficient visuel, son suivi, voire son guidage. Un modèle de guidage fondé sur un graphe de mobilité cognitive extrait à partir d’une carte (d’un bâtiment (musée) ou de l’extérieur) sera proposé.
Ce graphe permettra d’implanter de nouvelles stratégies de mobilités pour les déficients visuels (e.g. une intégration améliorée de chemin) et également d’assister la compréhension de l’espace autour de soi – space awareness (qui s’appuie sur le concept de « gist spatial »).
Les objectifs sont de trois natures différentes : théorique, de réalisation et validation expérimentale.
L’élaboration d’un nouveau modèle de déplacement bio-inspiré s’appuyant sur les cartes/plans architecturaux et permettant d’assister les déplacements, à l’intérieur et à l’extérieur, constitue l’objectif théorique de cette thèse.
L’ensemble des concepts et des outils proposés durant ce travail doctoral devrait conduire au concept d’une nouvelle : interface homme-machine-espace collaborative et interactive, interface capable d’assister l’homme dans son analyse de l’espace et dans ses interactions avec l’espace (ici : via la mobilité), interface de « l’homme augmenté ». C’est aussi un objectif théorique.
Le prototype académique de cette interface, GM-Navig, sera construit autour de la tablette F2T du LITIS et du système de vision portatif (à réaliser) ; son contrôle intégrera le modèle bio-inspiré théorique proposé. La réalisation de GM-Navig mettra en œuvre l’approche de l’adéquation algorithme-architecture sous contraintes avec l’optimisation du système tant en espace (faibles ressources et miniaturisés, transmissions simplifiées) qu’en performances temporelles ainsi que la gestion optimisée de l’énergie consommée (conception et de réalisation durables). Ce sont des objectifs de réalisation.
Le prototype académique proposé du système GM-Navig sera testé et validé, dans des scenarios réalistes, voire réels, avec les utilisateurs finaux (les PPIV et les instructeurs de locomotion), et finalement intégré au Guide Muséal (GM). Ces sont des objectifs de validation expérimentale. Il est fort probable que des résultats expérimentaux vont conduire à l’affinement du modèle théorique proposé.<:p>
Des modèles préliminaires ont été proposés par des membres de l’équipe LITIS STI (groupe P & I, Perception et Interaction), et ont pu démontrer leur fiabilité [Gay 20, Pis 18]. Nos modèles utilisent des cellules de lieu pour cartographier l’environnement et pour établir un graphe de navigation, et des cellules de grille pour estimer les déplacements autour des cellules de lieu de façon précise. L’utilisation conjointe de cellules de lieu et de grille permet d’établir une représentation de l’environnement ne nécessitant que peu de ressources, tout en restant très précise, fiable, et tolérante aux changements de l’environnement. Ces modèles pourront servir de base pour le développement de systèmes plus aboutis. Par ailleurs, les séjours doctoraux de Mlle Afif (Université de Monastir) au LITIS ont permis d’établir une première liste de PIM [AFi 19].
Les modèles de localisation et de navigation bio-inspirés, s’ils s’avèrent suffisamment fiables, pourront être étendus aux systèmes de contrôle des plateformes mobiles autonomes : canne intelligente, robots humanoïdes, drones, véhicules autonomes, robotique biomédicale. Par ailleurs, ils pourront être adaptés aux jeux sérieux (e.g. traitement des hémi-négligents spatiaux) et aux jeux de loisirs.